RETARD DE DIAGNOSTIC

Un retard de diagnostic, même fautif, n’est pas toujours constitutif d’une perte de chance.

Cass. Civ. 1, 29 mars 2023, 22-13.630, Inédit

Une femme fait réaliser une mammographie de contrôle en septembre 2010.

Cette radiographie conclut à l’absence de lésions décelables.

Néanmoins, et dès le 15 février 2011, un diagnostic d’adénocarcinome mammaire est posé. Elle débute alors une chimiothérapie.

La progression de la maladie l’obligera à subir une mastectomie et un curage axillaire le 30 août 2011.

La patiente, pensant que le retard de diagnostic a rendu inévitable la mastectomie et le curage axillaire qu’elle a dû subir, recherche la responsabilité de la radiologue et saisit la CCI.

La CCI lui a donné raison et conclut effectivement à la responsabilité de la radiologue mais son assureur de responsabilité professionnelle refuse de lui faire une offre d’indemnisation.

La patiente assigne donc l’assureur en indemnisation de ses préjudices découlant du retard de diagnostic devant le tribunal judiciaire.

La patiente soutient qu’un retard de diagnostic de 5 mois d’une tumeur cancéreuse impliquait nécessairement la perte d’une chance de prise en charge précoce, de nature à améliorer son traitement et probablement à lui éviter la mastectomie.

La demanderesse, au pourvoi, reproche également à la cour d’appel de s’être exclusivement fondée sur le rapport d’expertise judiciaire qui précisait que les Experts étaient dans « l’incapacité d’évaluer une éventuelle perte de chance de la patiente d’échapper à une mastectomie. »

La patiente produisait aux débats un avis d’un médecin conseil de la CPAM, qui lui, avait retenu la réalité de la perte de chance et du lien de causalité, en soulignant que la prise en charge du cancer du sein, à un stade précoce, aurait nécessité des soins sur une période plus courte et qu’il n’y aurait pas eu de mastectomie totale.

Enfin, la demanderesse relevait que le rapport d’expertise précisait que si le diagnostic avait été posé dès le mois de septembre, la chimiothérapie aurait été « probablement indiquée ».

La Cour de cassation ne retient aucun de ces arguments et déboute la demanderesse de sa demande de réformation de l’arrêt de la cour d’appel, elle précise que :

« Une perte de chance présente un caractère direct et certain chaque fois qu’est constaté la disparition d’une éventualité favorable. Dès lors, il n’y a pas de perte de chance lorsqu’il est tenu pour certain que la faute n’a pas eu de conséquence sur l’état de santé du patient. »

La Cour de cassation confirme que la radiologue mise en cause avait bien commis une erreur fautive d’interprétation de l’imagerie et que celle-ci était bien à l’origine d’un retard de diagnostic du cancer du sein de la demanderesse.

Cependant, elle approuve le raisonnement de la cour d’appel qui précise qu’en réalité dès septembre 2010, la patiente était déjà porteuse d’une lésion qui s’accompagnait d’un carcinome.

En d’autres termes, que la maladie était déjà suffisamment avancée pour considérer qu’une mastectomie aurait été indispensable dès le mois de septembre 2010.

Dans ces conditions, la cour d’appel n’avait même pas à se prononcer sur l’avis contraire du médecin conseil de la sécurité sociale.

De ce fait, la Cour de cassation considère que la demanderesse n’a perdu aucune chance d’éviter une mastectomie et un curage axillaire.