DEPAKINE : Création d’un fond d’indemnisation pour les victimes

Aux termes d’un amendement adopté par l’Assemblée nationale le 15 novembre dernier, concernant le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, les députés ont accepté la proposition du gouvernement de créer un fond d’indemnisation pour les victimes de la DEPAKINE.
Sous réserve de son maintien dans le texte définitif, cet amendement prévoit que toute personne s’estimant victime d’un préjudice à raison d’une ou plusieurs malformations ou de troubles du développement imputables à la prescription de DEPAKINE pendant la grossesse, avant le 31 décembre 2015 (date de publication des restrictions de prescription de la DEPAKINE par l’ANSM), pourra recourir à ce fond.

Comme pour le Médiator, les députés ont décidé de confier la mission de l’indemnisation des victimes du Valproate de sodium (DEPAKINE) ou de l’un de ses dérivés à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM).

Cependant, compte tenu des critiques formulées à l’encontre du fond d’indemnisation des victimes du Médiator, également géré par l’ONIAM, l’amendement prévoit une procédure d’indemnisation quelque peu différente.

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Médiator : Le laboratoire Servier condamné

Jugement TGI Nanterre, 22 octobre 2015

Pour la première fois depuis que le scandale du Médiator a éclaté, une juridiction civile vient de condamner le laboratoire Servier à indemniser les préjudices de deux patients et les ayants droits de l’un des deux (son épouse et ses enfants).

On rappellera que le Médiator, nom commercial du Benfluorex, était une spécialité pharmaceutique prescrite pour corriger l’excès de graisse dans le sang et comme traitement pour les patients diabétiques en surpoids. Il a fait l’objet d’une suspension de son AMM en novembre 2009 puis de retrait du marché en juin 2010 en raison de sa toxicité cardio-vasculaire caractérisée  par un risque d’hypertension artério-pulmonaire (HTAP) . On évalue aujourd’hui à plus de 2000, le nombre de décès liés à la prise du Médiator. Continuer la lecture de « Médiator : Le laboratoire Servier condamné »

Refus de traitement et infection nosocomiale

Cour de cassation, 1ère Ch. Civ., 15 janvier 2015, n°13-21180

Un patient subit deux interventions chirurgicales et présente à la suite de la seconde une hyperthermie indiquant un état infectieux. Trois jours après la découverte de l’infection, il prend la décision, contre avis médical, de refuser tout traitement et de quitter l’établissement dans lequel il est hospitalisé pour rentrer chez lui. Un mois après, son état s’étant aggravé, il est hospitalisé dans un nouvel établissement. Une septicémie par streptocoque est lors diagnostiquée avec des atteintes secondaires à l’épaule, au foie et au coeur qui vont nécessiter plusieurs traitements. Le patient recherche alors la responsabilité du premier établissement dans lequel il a été hospitalisé et celle du chirurgien qui l’avait pris en charge. Continuer la lecture de « Refus de traitement et infection nosocomiale »

Cumul de l’assistance tierce personne et de la prestation de compensation du handicap

La possibilité de cumul des indemnités réparant le préjudice d’assistance par tierce personne  et de la prestation de compensation du handicap.

Cour de cassation, civ 2ème , 13 février 2014, n° de pourvoi : 12-23706

 Une maison départementale des personnes handicapées a refusé à une personne atteinte de tétraplégie le bénéfice de la prestation de compensation du handicap au motif que l’indemnisation de l’ONIAM qu’elle a perçue incluait les frais d’assistance par une tierce personne.

La personne handicapée a contesté cette décision et la Cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accident du travail a annulé celle-ci. Continuer la lecture de « Cumul de l’assistance tierce personne et de la prestation de compensation du handicap »

Vaccination contre l’hépatite B et information

L’absence d’information sur un risque non reconnu par les données acquises de la science ne constitue pas une faute. 

 Cour de cassation, Civ. 1ère , 23 janvier 2014, n° de pourvoi : 12-22123

Une patiente atteinte d’une sclérose latérale amyotrophique (SLA) recherchait la responsabilité du médecin généraliste qui lui avait administré ou prescrit plusieurs injections vaccinales contre l’hépatite B juste avant que la maladie ne se déclare.

Débouté de ses demandes par la Cour d’appel, la patiente a formé un pourvoi en cassation aux motifs que le médecin ne l’a pas informée de l’existence d’un risque d’apparition de sclérose latérale amyotrophique suite à la vaccination.

Elle se prévalait donc d’un préjudice de défaut d’information et d’un préjudice de perte de chance d’éviter la survenue de la pathologie.

La Cour de cassation rejette le pourvoi et confirme la décision de la Cour d’appel aux motifs que l’obligation d’information du médecin ne porte que sur les risques reconnus par les données acquises de la science.

En effet, les experts relèvent que la quasi-unanimité des scientifiques écarte tout lien de causalité entre le vaccin contre l’hépatite B et l’apparition de la SLA et que ni la notice du vaccin, ni le dictionnaire médical Vidal ne mettent en garde contre une éventualité d’apparition d’une SLA après vaccination.

De ce fait, le risque de développer une SLA à la suite d’une vaccination contre l’hépatite B ne constitue pas un risque reconnu par les données acquises de la science. De ce fait, l’absence d’information sur ce risque ne peut ouvrir droit à réparation.

Relations sexuelles sciemment non protégées et contamination par le VIH

Cour de cassation, 1ère Ch. civ., 22 janvier 2014, n°12-35.023

M. X, hémophile depuis l’enfance a été contaminé par le VIH a indemnisé par le Fonds d’indemnisation des transfusés et hémophiles entre 1994 et 1998. Il se marie  en 2000 et en 2002, la contamination de son épouse et celle de leur fille est diagnostiquée. En 2008, l’ONIAM a adressé aux époux X une offre d’indemnisation de leurs préjudices. Ces derniers l’ont partiellement acceptée, refusant la partie correspondant aux troubles dans leurs conditions d’existence formulée au nom de chacun des membres de la famille.

Les époux X ont alors saisi la cour d’appel de Paris  et l’ONIAM a alors fait savoir, s’estimant délié de l’offre faite, qu’il retirait l’indemnisation proposée à M. X en réparation du préjudice moral qu’il prétendait avoir subi du fait de la contamination de son épouse et de leur fille. Cette prétention est rejetée par la Cour d’appel, au motif que l’ONIAM n’était pas délié des offres qu’il avait formulées pendant la phase non contentieuse de la procédure, et a notamment alloué à M. X les sommes de 9 150 et 7 620 euros du fait de la contamination de son épouse et de sa fille.

Ce raisonnement n’a cependant pas prospéré devant la Cour de cassation qui censure le raisonnement de la Cour d’appel estimant que le refus de l’offre d’indemnisation, par la victime, la rend caduque, de sorte que l’ONIAM s’en trouvait délié et que : « l’ONIAM (…) ne saurait être tenu, fût-ce partiellement, des préjudices propres invoqués par la personne contaminée, du fait de la contamination de ses proches, lorsque cette contamination a été causée par des relations sexuelles non protégées auxquelles cette personne, qui s’était ainsi affranchie de la contrainte qu’elle prétendait avoir subie, a eu sciemment recours ».

Retard de diagnostic : l’indemnisation de la perte de chance d’obtenir des séquelles moins graves

Conseil d’Etat, 20 mars 2013

Une femme éprouve des douleurs et des sensations de perte de sensibilité dans les jambes. Le 11 avril 2003, une IRM révèle une affection des disques intervertébraux pour laquelle une infiltration est réalisée. Les symptômes persistant, elle consulte le 15 mai 2003, un neurologue qui  les attribue à une dépression et prescrit un traitement correspondant.

Le 1er juillet 2003, du fait de l’aggravation de son état, la patiente se rend aux urgences et une tumeur des méninges à l’origine de la compression de la moelle épinière est diagnostiquée.

A la suite de l’ablation de cette tumeur, la patiente a présenté une paraplégie dont elle conserve de graves séquelles.

Elle assigne alors  le neurologue en responsabilité pour faute de diagnostic lui ayant causé une perte de chance d’éviter ce dommage.

La Cour d’appel retient la responsabilité pour faute du centre hospitalier mais ne fait droit que partiellement à la demande de la patiente. Elle estime que, compte tenu de la croissance très lente de la tumeur qui se développait depuis plusieurs années, le retard de quelques semaines apporté du fait de cette erreur à l’intervention chirurgicale, n’a pas compromis les chances de la patiente d’obtenir une récupération totale de ses facultés.

Le Conseil d’Etat annule la décision de la Cour d’appel et rappelle que dans le cas où la faute commise, lors de la prise en charge d’un patient dans un établissement public hospitalier, a compromis ses chances d’obtenir une amélioration de son état de santé ou d’échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute et qui doit être intégralement réparé n’est pas le dommage corporel mais la perte de chance d’éviter la survenue de ce dommage.

La Cour d’appel en recherchant uniquement si la patiente a été privée d’une chance de récupération totale alors qu’elle devait également rechercher si elle avait été privée d’une chance de conserver des séquelles moins graves que celle dont elle demeurait atteinte a commis une erreur de droit.

Le résultat inesthétique d’une intervention de chirurgie esthétique n’est qu’un inconvénient de l’opération non indemnisable

Cour d’appel de Paris, 30 novembre 2012

Une patiente subit une intervention de chirurgie esthétique pour supprimer les tatouages de ses sourcils et les reconstituer à l’aide d’une greffe de cheveux.

Estimant le résultat insatisfaisant, notamment en raison d’une asymétrie du sourcil droit, elle assigne son chirurgien esthétique pour manquement à son obligation d’information et pour le caractère insuffisamment esthétique du résultat obtenu.

La Cour d’appel de Paris déboute la plaignante de ses demandes et confirme ainsi le jugement de 1ère instance.

Concernant l’obligation d’information, la Cour rappelle qu’elle est étendue en matière de chirurgie esthétique, le chirurgien devant informer le patient des conditions, risques, conséquences et complications de l’intervention ainsi que des répercussions physiques, esthétiques et psychologiques de l’acte pratiqué.

Elle évoque également la procédure de l’information du patient qui comprend notamment la remise d’un devis détaillé et le respect obligatoire d’un délai de réflexion de 15 jours avant de réaliser l’intervention afin d’obtenir un consentement éclairé du patient.

Enfin, elle rappelle qu’il appartient au médecin d’établir par tous moyens qu’il a rempli son obligation. Preuve rapportée en l’espèce puisque la patiente avait été soumise à deux consultations médicales avant l’intervention, la mention d’une information verbale avait été notée dans son dossier médical, une information complémentaire lui avait été donnée le jour de l’intervention et elle avait reconnu avoir été destinataire de l’information. Enfin, le délai de quinze jours avait, lui aussi, été respecté.

Concernant l’obligation de soins à l’égard de la patiente, la Cour rappelle que le chirurgien esthétique n’est pas tenu d’une obligation de résultat mais de moyens et qu’il appartient à la patiente de rapporter la preuve que le chirurgien aurait commis, dans la dispensation des soins, une faute dont il aurait résulté pour elle un dommage.

Or, selon le rapport d’expertise, le chirurgien avait réalisé une technique opératoire conforme aux données acquises de la science, la patiente n’ayant subi aucune complication opératoire, ni incapacité de travail, ni pretium doloris.

Le caractère insuffisamment esthétique du résultat obtenu ne constituant qu’un inconvénient de l’intervention, signalé dans la notice d’information, qui avait été portée à la connaissance de la patiente.