Aux termes d’un amendement adopté par l’Assemblée nationale le 15 novembre dernier, concernant le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, les députés ont accepté la proposition du gouvernement de créer un fond d’indemnisation pour les victimes de la DEPAKINE.
Sous réserve de son maintien dans le texte définitif, cet amendement prévoit que toute personne s’estimant victime d’un préjudice à raison d’une ou plusieurs malformations ou de troubles du développement imputables à la prescription de DEPAKINE pendant la grossesse, avant le 31 décembre 2015 (date de publication des restrictions de prescription de la DEPAKINE par l’ANSM), pourra recourir à ce fond.
Comme pour le Médiator, les députés ont décidé de confier la mission de l’indemnisation des victimes du Valproate de sodium (DEPAKINE) ou de l’un de ses dérivés à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM).
Cependant, compte tenu des critiques formulées à l’encontre du fond d’indemnisation des victimes du Médiator, également géré par l’ONIAM, l’amendement prévoit une procédure d’indemnisation quelque peu différente.
Ce sont deux collèges d’Experts distincts qui interviendront dans l’indemnisation des victimes de la Dépakine, là ou un seul et unique collège d’Expert se prononce sur l’indemnisation des victimes du Médiator.
Le premier collège d’Expert, composé principalement de médecins, sera chargé de déterminer si les préjudices subis par la victime sont imputables à la prescription de DEPAKINE.
Si ce collège l’estime utile, il pourra diligenter une expertise médicale et devra rendre son avis dans les 4 mois qui suivent la saisine de l’ONIAM.
Aucun recours ne pourra être diligenté contre cet avis sauf à saisir une juridiction.
L’étendue de la mission du premier collège d’expert est limitée puisque le texte ne lui accorde comme seule compétence de se prononcer sur un lien de causalité entre les dommages et la prescription de DEPAKINE.
Quid de l’évaluation des préjudices ?
Dans le cas où ce collège reconnaîtrait une imputabilité entre les préjudices et la prescription de DEPAKINE, il transmettra la demande d’indemnisation au comité d’indemnisation, second collège d’experts, indépendant du premier et présidé par un magistrat, qui sera chargé de se prononcer sur les circonstances, les causes, la nature et l’étendue des dommages ainsi que sur l’identité d’un éventuel responsable.
L’amendement prévoit que ce second comité pourra procéder à toute investigation utile. On suppose qu’une seconde expertise permettant d’évaluer les préjudices ou de se prononcer sur les responsabilités encourues pourrait être réalisée.
Si l’on comprend que le but de ce double collège était d’éviter qu’un collège unique soit à la fois juge et partie, la lourdeur du processus est indéniable et, à la lumière des délais supportés concrètement par les victimes dans les autres procédures ONIAM, semble peu compatible avec les délais prévus aux termes de l’amendement puisque le comité d’indemnisation devra rendre son avis dans les trois mois suivant sa saisine.
Quant au responsable identifié par le comité d’indemnisation, il devra faire une proposition d’indemnisation dans le mois suivant la réception de l’avis se prononçant sur les préjudices et les responsabilités.
Comme pour le Médiator, en l’absence de proposition indemnitaire, ou dans le cas d’une proposition manifestement insuffisante, l’ONIAM se substituera au responsable et indemnisera les victimes sous trois mois.
La création d’un fond d’indemnisation constituera effectivement une mesure facilitatrice pour les victimes, à condition qu’il offre une vraie alternative à la voie judiciaire : meilleurs délais pour une expertise et une indemnisation d’égale qualité.
En tout état de cause, l’existence de ce fond d’indemnisation laisse entière la possibilité pour les victimes d’obtenir l’indemnisation de leurs préjudices devant les juridictions judiciaires et administratives.