Carence de l’Etat et prise en charge de l’autisme

Cour Administrative d’appel de Marseille du 11 juin 2012, N° 11MA02042

Sur renvoi prononcé par le Conseil d’Etat aux termes de son arrêt de principe du 16 mai 2011 (n°318501), la Cour administrative d’appel de Marseille a confirmé que l’absence de prise en charge par une structure adaptée aux besoins spécifiques d’un jeune garçon souffrant d’autisme, engage bien la responsabilité de l’Etat.

C’est en invoquant notamment l’article L. 246-1 du code de l’action sociale et des familles que la Cour d’appel condamne l’Etat à réparer le préjudice de la mère et de son jeune garçon. En effet, l’article L. 246-1 du CASF dispose :  » Toute personne atteinte du handicap résultant du syndrome autistique et des troubles qui lui sont apparentés bénéficie, quel que soit son âge, d’une prise en charge pluridisciplinaire qui tient compte de ses besoins et difficultés spécifiques.  Adaptée à l’état et à l’âge de la personne et eu égard aux moyens disponibles, cette prise en charge peut être d’ordre éducatif, pédagogique, thérapeutique et social. »

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Refus de traitement et infection nosocomiale

Cour de cassation, 1ère Ch. Civ., 15 janvier 2015, n°13-21180

Un patient subit deux interventions chirurgicales et présente à la suite de la seconde une hyperthermie indiquant un état infectieux. Trois jours après la découverte de l’infection, il prend la décision, contre avis médical, de refuser tout traitement et de quitter l’établissement dans lequel il est hospitalisé pour rentrer chez lui. Un mois après, son état s’étant aggravé, il est hospitalisé dans un nouvel établissement. Une septicémie par streptocoque est lors diagnostiquée avec des atteintes secondaires à l’épaule, au foie et au coeur qui vont nécessiter plusieurs traitements. Le patient recherche alors la responsabilité du premier établissement dans lequel il a été hospitalisé et celle du chirurgien qui l’avait pris en charge. Continuer la lecture de « Refus de traitement et infection nosocomiale »

Rédaction d’un certificat médical et immixtion abusive dans les affaires de famille

Chambre disciplinaire nationale, 9 octobre 2013, n°11527

Un psychiatre remet à sa patiente un courrier destiné à une consoeur pédopsychiatre en charge de ses enfants. Ce courrier évoque, sans qu’il ne l’ait jamais rencontré, une paranoïa du père ainsi que les conséquences sur les enfants du couple évoquant la possibilité de pression du père afin qu’il demandent au juge la mise en place d’une garde alternée. Ce courrier est produit aux débats de la procédure de divorce qui oppose les parents.

Le médecin psychiatrique va faire l’objet d’une plainte déposée par le père.

La Chambre disciplinaire va d’abord écarter la qualification de certificat médical et donc l’application de l’article R.4127-28 du Code de la santé publique pour retenir en revanche celle de l’article R.4127-51 lequel fait défense au médecin de s’immiscer dans les affaires de famille ou la vie privée de ses patients, sauf raison professionnelle. C’est précisément ce fondement qu’a cru bon de soutenir le médecin poursuivi estimant que la vie familiale de sa patiente faisait partie de son champ d’intervention et de sa prise en charge. La chambre disciplinaire écarte son argumentation retenant que sans avoir jamais rencontré le père ni les enfants, il ne pouvait qualifier de son propre chef l’état psychique du père et lui imputer la seule responsabilité des souffrances subies par les enfants compte tenu du divorce de leurs parents.

Une infection survenue en post-opératoire est nosocomiale

Conseil d’Etat, 30 décembre 2014, n° 36 6415 :

Un patient subit un pontage fémoro-poplité sur la jambe gauche. Il va présenter  sur la jambe opérée un érysipèle veino lymphatique d’origine streptococcique provoquant des séquelles douloureuses, affectant notamment la marche. À la suite d’une expertise amiable et d’une expertise diligentée par la commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CCI), il a été conclu à une infection postopératoire. Le 8 février 2006, la CRCI a émis un avis selon lequel l’affection dont il avait été atteint ne constituait pas une infection nosocomiale. La Cour d’appel va aller dans le même sens et rejette sa demande  indemnitaire. Saisi du pourvoi, le Conseil d’État va contredire la cour d’appel  : « en écartant ainsi la qualification d’infection nosocomiale tout en constatant que le prélèvement de la veine saphène avait provoqué la stase lymphatique à l’origine de l’infection, et alors que celle ci était survenue au cours de la prise en charge médicale et que la circonstance qu’elle avait été favorisée par l’état du patient n’était pas de nature à lui ôter son caractère nosocomial, ni d’ailleurs à la faire regarder comme résultant d’une cause étrangère».

Dommages provoqués par une intubation versus dommages provoqués par l’absence d’intubation

Conseil d’Etat, 12 décembre 2014, n°365211

Une patiente a dû subir une intubation en urgence, suite à un coma diabétique. Cette intubation a provoqué une sténose laryngée, entrainant des difficultés à respirer et à déglutir. Elle sollicite du Conseil d’État que ce préjudice soit indemnisé par l’ONIAM. A cette occasion le Conseil d’Etat rappelle que l’ONIAM ne procède à la réparation de dommages résultant directement d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’à « la double condition qu’ils présentent un caractère d’anormalité au regard de l’état de santé du patient comme de l’évolution prévisible de cet état et que leur gravité excède le seuil prévu par la loi ».  Le Conseil d’État précise que « la condition d’anormalité du dommage […] doit toujours être regardée comme remplie lorsque l’acte médical a entrainé des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l’absence de traitement». Enfin, il considère que «lorsque les conséquences de l’acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l’absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l’acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible». Or, en l’espèce, le pourvoi de la patient va être rejeté, car le Conseil d’Etat va considérer que bien que les conséquences de l’intubation étaient exceptionnelles et favorisées par les conditions d’intervention en urgence, elle n’étaient pas plus graves que celles auxquelles la requérante était exposée, du fait de sa pathologie.

Provoquer délibérément la mort d’un patient en concertation avec la famille est contraire à la loi Léonetti

Conseil d’Etat, 30 décembre 2014, n°381245 :

Le Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) a prononcé la radiation du tableau de l’ordre d’un médecin qui avait provoqué délibérément la mort de plusieurs patients à l’aide d’injections à base de curare. Le médecin a tenté d’obtenir une réformation de cette décision devant le Conseil d’Etat qui vient de rejeter son pourvoi. Le médecin poursuivi avait, pour justifier son acte, soutenu qu’il avait agi dans le but de soulager la souffrance de ses patient et en concertation avec  leur famille. Le Conseil d’Etat a considéré que ces circonstances n’étaient pas de nature a retirer leur caractère fautif aux actes qui avaient été commis.

En effet, la loi Léonetti n’autorise pas l’acte qui consiste a délibérément provoquer le décès d’un patient.

Cumul de l’assistance tierce personne et de la prestation de compensation du handicap

La possibilité de cumul des indemnités réparant le préjudice d’assistance par tierce personne  et de la prestation de compensation du handicap.

Cour de cassation, civ 2ème , 13 février 2014, n° de pourvoi : 12-23706

 Une maison départementale des personnes handicapées a refusé à une personne atteinte de tétraplégie le bénéfice de la prestation de compensation du handicap au motif que l’indemnisation de l’ONIAM qu’elle a perçue incluait les frais d’assistance par une tierce personne.

La personne handicapée a contesté cette décision et la Cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accident du travail a annulé celle-ci. Continuer la lecture de « Cumul de l’assistance tierce personne et de la prestation de compensation du handicap »

Vaccination contre l’hépatite B et information

L’absence d’information sur un risque non reconnu par les données acquises de la science ne constitue pas une faute. 

 Cour de cassation, Civ. 1ère , 23 janvier 2014, n° de pourvoi : 12-22123

Une patiente atteinte d’une sclérose latérale amyotrophique (SLA) recherchait la responsabilité du médecin généraliste qui lui avait administré ou prescrit plusieurs injections vaccinales contre l’hépatite B juste avant que la maladie ne se déclare.

Débouté de ses demandes par la Cour d’appel, la patiente a formé un pourvoi en cassation aux motifs que le médecin ne l’a pas informée de l’existence d’un risque d’apparition de sclérose latérale amyotrophique suite à la vaccination.

Elle se prévalait donc d’un préjudice de défaut d’information et d’un préjudice de perte de chance d’éviter la survenue de la pathologie.

La Cour de cassation rejette le pourvoi et confirme la décision de la Cour d’appel aux motifs que l’obligation d’information du médecin ne porte que sur les risques reconnus par les données acquises de la science.

En effet, les experts relèvent que la quasi-unanimité des scientifiques écarte tout lien de causalité entre le vaccin contre l’hépatite B et l’apparition de la SLA et que ni la notice du vaccin, ni le dictionnaire médical Vidal ne mettent en garde contre une éventualité d’apparition d’une SLA après vaccination.

De ce fait, le risque de développer une SLA à la suite d’une vaccination contre l’hépatite B ne constitue pas un risque reconnu par les données acquises de la science. De ce fait, l’absence d’information sur ce risque ne peut ouvrir droit à réparation.

Relations sexuelles sciemment non protégées et contamination par le VIH

Cour de cassation, 1ère Ch. civ., 22 janvier 2014, n°12-35.023

M. X, hémophile depuis l’enfance a été contaminé par le VIH a indemnisé par le Fonds d’indemnisation des transfusés et hémophiles entre 1994 et 1998. Il se marie  en 2000 et en 2002, la contamination de son épouse et celle de leur fille est diagnostiquée. En 2008, l’ONIAM a adressé aux époux X une offre d’indemnisation de leurs préjudices. Ces derniers l’ont partiellement acceptée, refusant la partie correspondant aux troubles dans leurs conditions d’existence formulée au nom de chacun des membres de la famille.

Les époux X ont alors saisi la cour d’appel de Paris  et l’ONIAM a alors fait savoir, s’estimant délié de l’offre faite, qu’il retirait l’indemnisation proposée à M. X en réparation du préjudice moral qu’il prétendait avoir subi du fait de la contamination de son épouse et de leur fille. Cette prétention est rejetée par la Cour d’appel, au motif que l’ONIAM n’était pas délié des offres qu’il avait formulées pendant la phase non contentieuse de la procédure, et a notamment alloué à M. X les sommes de 9 150 et 7 620 euros du fait de la contamination de son épouse et de sa fille.

Ce raisonnement n’a cependant pas prospéré devant la Cour de cassation qui censure le raisonnement de la Cour d’appel estimant que le refus de l’offre d’indemnisation, par la victime, la rend caduque, de sorte que l’ONIAM s’en trouvait délié et que : « l’ONIAM (…) ne saurait être tenu, fût-ce partiellement, des préjudices propres invoqués par la personne contaminée, du fait de la contamination de ses proches, lorsque cette contamination a été causée par des relations sexuelles non protégées auxquelles cette personne, qui s’était ainsi affranchie de la contrainte qu’elle prétendait avoir subie, a eu sciemment recours ».

L’indemnisation du préjudice de perte de gains professionnels futurs chez l’enfant

CA CHAMBERY, 2eme chambre, 18 avril 2013, n° 12/00678

 Le 22 septembre 2000, Benjamin, un enfant de 11 ans, a été renversé par un véhicule. S’en est suivi un coma traumatique de plusieurs semaines. L’accident a provoqué de lourdes séquelles, notamment des troubles cognitifs, des troubles comportementaux et des signes cérébelleux nécessitant un placement de l’enfant en centre spécialisé.

La conductrice du véhicule a été jugée responsable de l’accident par le Tribunal correctionnel qui a ordonné une expertise.

L’enfant, ses parents et sa sœur ont assigné l’assureur du responsable en réparation de leurs préjudices. Continuer la lecture de « L’indemnisation du préjudice de perte de gains professionnels futurs chez l’enfant »