Droit à l’information et thérapeutique nouvelle

Décision de la Cour d’administrative de Marseille du 7 janvier 2016,  n°14MA00282

L’absence de recul sur les risques d’une thérapeutique nouvelle, n’exonère pas le centre hospitalier de son obligation d’information envers le patient.

C’est ce qui résulte de la décision de la CAA de Marseille n°14MA00282 du 7 janvier 2016.

En l’espèce, Monsieur C, souffrant d’un adénome de la prostate résistant aux traitements médicamenteux, a été hospitalisé au sein du CHU de Nice en vue de bénéficier d’une technique opératoire nouvelle (thermothérapie par laser). Cependant, l’intéressé a conservé, dans les suites de l’opération, une incontinence urinaire.

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Infection nosocomiale et médecine libérale

Victime d’une infection nosocomiale, un patient a pris l’heureuse initiative  de saisir le Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative à « la conformité de l’article L. 1142-1, I, alinéa 1er et alinéa 2, du code de la santé publique au principe d’égalité des citoyens devant la loi garanti par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

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Droit à l’information du patient et intervention impérieuse

Arrêt du Conseil d’Etat,  n°37 6620 du 3 février 2016

Mme B…a subi le 23 mars 2001 au centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Lille une intervention chirurgicale destinée à réduire deux hernies discales thoraciques qui entraînaient une compression de la moelle épinière. En raison d’une lésion médullaire provoquée par cette intervention, la patiente est demeurée atteinte de paraplégie. Elle a donc recherché la responsabilité de l’établissement.

Dans cette affaire, le Conseil d’État énonce que le défaut d’information du praticien ne cause comme préjudice qu’une perte de chance et que ce préjudice peut être rejeté que dans le cas où « l’intervention était impérieusement requise, en sorte que le patient ne disposait d’aucune possibilité raisonnable de refus ».

Or, la cour administrative d’appel avait rejeté le préjudice de perte de chance lié au défaut d’information au motif que l’intervention présentait un caractère impérieux mais sans préciser « dans quel délai une évolution vers une paraplégie était susceptible de se produire si la patiente refusait de subir dans l’immédiat l’intervention qui lui était proposée ».  En ne justifiant pas le caractère impérieux de l’intervention , la cour administrative d’appel  ne pouvait donc pas rejeter, sur cet argument, la demande indemnitaire de la patiente.

En introduisant la notion de délai dans lequel survient le risque dont le patient n’a pas été informé,  le Conseil d’Etat introduit une condition qui se rapproche de la définition de l’urgence (risque vital et immédiat). Ainsi, seule la situation d’urgence subie par le patient conduirait au rejet de son indemnisation sur le fondement du défaut d’information.

Loi de santé : Tiers payant et liberté de prescription

Décision du Conseil Constitutionnel n°2015-727 DC du 26 janvier 2016 : loi de modernisation de notre système de santé

Par sa décision en date du 21 janvier 2016, le Conseil Constitutionnel, saisi par plus de soixante députés et sénateurs, s’est prononcé sur la loi de modernisation de notre système de santé. Cette saisine soumettait à l’appréciation de la cour suprême de nombreuses dispositions de la loi et notamment, celles relatives à l’interdiction de la vente de tabac aromatisé, sur l’interdiction de la publicité pour le tabac à l’intérieur des débits de tabac, sur le paquet de tabac « neutre », sur la réduction des risques et des dommages pour les consommateurs de drogue ou encore sur la suppression du délai de réflexion d’une semaine en cas de demande d’interruption de grossesse. Ces différentes dispositions n’ont pas subi la censure du Conseil Constitutionnel.

En revanche, les sages ont jugé contraires à la Constitution les dispositions de la loi qui rendent obligatoire, à compter du 1er janvier 2017, le dispositif du tiers payant pour les organismes maladie complémentaire.

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Aggravation de l’état de santé et perte de chance

Conseil d’Etat, 27 novembre 2015, n°378266

Un patient a été admis aux urgences du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, le 21 septembre 2005 alors qu’il souffrait de violentes douleurs hypogastriques. Une échographie abdominale a été pratiquée révélant, outre une vésicule biliaire lithiasique, la présence, sur la vessie du patient, de polypes vésicaux au niveau de la paroi latérale droite.

Pour autant, aucune suite médicale n’a été donnée à la découverte de ces polypes.

Le traitement du cancer du patient a débuté avec onze mois de retard.

Le Tribunal administratif de Besançon, ainsi que la CAA de Nancy ont reconnu la responsabilité du centre hospitalier pour faute et l’a condamné à verser des indemnités à Monsieur A. Continuer la lecture de « Aggravation de l’état de santé et perte de chance »

Médiator : Le laboratoire Servier condamné

Jugement TGI Nanterre, 22 octobre 2015

Pour la première fois depuis que le scandale du Médiator a éclaté, une juridiction civile vient de condamner le laboratoire Servier à indemniser les préjudices de deux patients et les ayants droits de l’un des deux (son épouse et ses enfants).

On rappellera que le Médiator, nom commercial du Benfluorex, était une spécialité pharmaceutique prescrite pour corriger l’excès de graisse dans le sang et comme traitement pour les patients diabétiques en surpoids. Il a fait l’objet d’une suspension de son AMM en novembre 2009 puis de retrait du marché en juin 2010 en raison de sa toxicité cardio-vasculaire caractérisée  par un risque d’hypertension artério-pulmonaire (HTAP) . On évalue aujourd’hui à plus de 2000, le nombre de décès liés à la prise du Médiator. Continuer la lecture de « Médiator : Le laboratoire Servier condamné »

AAH : électrosensibilité et handicap

Par une décision du 8  juillet 2015, le Tribunal de l’incapacité de Toulouse vient d’accorder l’AAH (Allocation Adulte Handicapé) à une personne souffrant d’électrosensibilité. La gravité de ses symptômes l’avait obligée à déménager dans une zone géographique la plus éloignée possible des émissions d’ondes électromagnétique la forçant ainsi à vivre dans un isolement quotidien éprouvant.

En 2005, l’OMS a reconnu que l’électrosensibilité était caractérisée « par divers symptômes non spécifiques qui diffèrent d’un individu à l’autre » mais qui « ont une réalité certaine et peuvent être de gravité très variable ». En effet, il n’existe aucun consensus scientifique permettant de relier les symptômes présentés par les personnes qui en sont atteintes avec l’exposition aux champs électromagnétiques. La preuve du lien de causalité entre les troubles présentés par les plaignants et l’exposition est donc particulièrement délicate à rapporter.

Sur la base de l’expertise médicale réalisée par la demanderesse, c’est la première fois qu’une juridiction française qualifie l’électrosensibilité de handicap suffisamment invalidant pour justifier qu’une allocation soit attribuée au demandeur.

Autisme : condamnation de l’Etat

Tribunal administratif de Paris : décisions du 15 juillet 2015 n°1416868/2-1, 1416874/2-1, 1416876/2-1, 1416880/2-1, 1416881/2-1, 1422391/2-1 et 1422407/2-1 :

Le 15 juillet, dernier le Tribunal administratif de Paris a rendu sept décisions aux termes desquelles il a condamné l’Etat à indemniser des enfants autistes et leurs parents. Le tribunal a en effet constaté l’existence de carences de sa part dans la mise en œuvre des moyens nécessaires à la prise en charge pluridisciplinaire de ces enfants.

Intervenant dans le prolongement de nombreuses décisions européennes (Comité européen des droits sociaux, 4 novembre 2003 et 11 septembre 2013), ces décisions consacrent le principe de l’obligation de résultat de l’Etat en matière de mise en place des moyens nécessaires à la prise en charge pluridisciplinaire des enfants autistes, et illustrent parfaitement le manque actuel de moyens accordés à l’éducation de ces enfants.

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Enfant autiste et manque de moyens

Conseil d’Etat, 27 novembre 2013 N° 373300

Dans un arrêt du 27 novembre 2013, le Conseil d’Etat a rejeté la requête des parents d’un enfant atteint d’autisme demandant son placement dans un institut médico-éducatif. Le Conseil d’Etat justifie sa décision en affirmant qu’une telle requête ne relève pas de la procédure de liberté-référé.

La procédure de liberté-référé peut être utilisée par un justiciable à condition que sa requête remplisse les conditions posées par l’article L. 521-2 du code de justice administrative qui dispose : « Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ». Pour utiliser une telle procédure, le justiciable doit donc avoir été victime d’une atteinte grave et manifestement illégale à l’une de ses libertés fondamentales et sa demande doit être urgente.

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L’autisme est-il un handicap comme un autre ?

Conseil d’Etat, 24 août 2011, N° 332876

Dans un arrêt rendu le 24 août 2011, le Conseil rejette la requête de l’association VAINCRE L’AUTISME qui lui demandait d’annuler pour excès de pouvoir trois articles du décret du 2 avril 2009 relatif à la scolarisation des enfants, adolescents et des jeunes adultes handicapés au motif que ceux-ci ne « contiennent pas de dispositions spécifiquement prévues pour les enfants ou adolescents atteints d’autisme ou des troubles envahissants du développement ». L’association VAINCRE L’AUTISME reprochait au décret attaqué de porter atteinte au principe d’égalité des usagers devant le service public de l’enseignement, au droit à l’éducation, au droit à la santé, à l’article 9 de la charte européenne des droits des personnes autistes du 9 mai 1996 et au droit à l’information de l’enfant autiste. Dans cette décision, le Conseil d’Etat valide le décret du 2 avril 2009 et soutient que ce dernier ne porte atteinte ni aux principes ni aux droits énoncés ci-dessus.

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